Lois et règlements

La superficie d’un immeuble est-elle une considération importante ?

Un entrepreneur a construit une unité d’habitation en copropriété divise. Ensuite, il l’a vendue à un client qui, insatisfait, lui a expédié une mise en demeure pour obtenir une réduction du prix d’achat de son unité d’habitation.

Ce client prétend que l’unité livrée n’a pas les dimensions promises. Selon lui, le certificat de localisation indique un manque de superficie de 20%. Quant à l’entrepreneur, celui-ci estime que les dimensions sont approximatives, telles que spécifiées dans la promesse d’achat, et qu’il contestera toute réclamation. Quels sont les facteurs pouvant être considérés par un tribunal, le cas échéant ?

1. L’examen des facteurs

Dans le cas d’un litige relatif à la contenance d’un immeuble, les tribunaux examinent un ensemble de facteurs. Ceux-ci peuvent comprendre notamment, les intentions de l’acheteur, les représentations effectuées, les documents impliquant les parties (p. ex., contrats, plans, dépliant promotionnel), ainsi que la superficie réellement livrée. Chaque cas en est un d’espèce, et il est évalué selon les faits et le droit applicable.

1.1 Les intentions de l’acheteur

Habituellement, la superficie habitable d’un immeuble ou la contenance en termes de pieds carrés de celui-ci est une considération importante pour l’acheteur. Cette considération peut se manifester lors de visites par celui-ci pour suivre l’évolution ou les étapes des travaux de construction relatifs à son immeuble. De même, elle peut résulter de sa décision d’acquérir une propriété ayant des dimensions précises pour répondre à ses besoins ou à ceux de sa famille. En revanche, dans certaines situations particulières, l’acquisition d’un immeuble peut être réalisée à des fins lucratives.

1.2 Les représentations

Une attention particulière doit être portée à l’application possible de la Loi sur la protection du consommateur[1] (la « Loi »). Celle-ci protège une personne physique quant à une représentation fausse ou trompeuse effectuée[2], entre autres, lors de la construction ou de la vente d’un immeuble[3]. Selon le contexte, un entrepreneur peut être assimilé à un commerçant au sens de cette Loi. Notons qu’une représentation fausse ou trompeuse constitue une pratique interdite et une telle représentation peut être sanctionnée par un tribunal. C’est le cas, par exemple, si on affirmait ou laissait croire que la superficie d’un immeuble construit sera de 2 500 pi2, alors que dans les faits, celle-ci est plutôt de 2 000 pi2.

1.3 Les documents

En principe, le tribunal vérifie si l’immeuble en cause a été vendu selon une contenance déterminée entre les parties. Pour ce faire, il examine un ensemble de documents, tels le contrat préliminaire, la promesse d’achat, l’acte de vente notarié, les plans, le certificat de localisation et un dépliant promotionnel, selon les circonstances.

La règle veut que le vendeur délivre la contenance ou la quantité indiquée au contrat, à moins qu’il ne soit évident que l’immeuble a été vendu sans égard à cette contenance[4]. Pour que le vendeur puisse se prévaloir de l’exception et fournir une contenance différente, il doit établir que les termes du contrat sont clairs ou que les circonstances reflètent réellement cette intention des parties. Les tribunaux enseignent que ce fardeau de preuve repose sur le vendeur et qu’il est lourd[5].

1.4 La superficie délivrée

Aussi, le tribunal examine la superficie réellement délivrée. Si le déficit de contenance est important, celui-ci risque de conclure que l’immeuble vendu ne correspond pas aux attentes légitimes de l’acheteur. Dans le cas d’une petite résidence, la Cour supérieure rappelle que chaque pied carré compte[6].

2. La conclusion

L’entrepreneur qui construit ou fait construire une unité d’habitation en copropriété divise pour le compte de son client doit établir une relation de confiance avec celui-ci. Il a intérêt de convenir avec lui des modalités qui concernent la contenance de l’immeuble. Il est suggéré de les indiquer clairement dans un document écrit. Des représentations ou explications doivent nécessairement être conformes à la réalité. On ne doit pas passer sous silence un fait important[7]. Habituellement, la contenance d’une unité d’habitation en copropriété divise est une considération importante pour l’acheteur. La prudence, la transparence et la rigueur sont donc de mise.


[1] Chapitre P-40.1, ci-après la Loi.

[2] Article 219 de la Loi.

[3] Article 6.1 et 215 de la Loi.

[4] Article 1720 du Code civil du Québec.

[5] Turgeon c. Germain Pelletier ltée, 2001 CanLII 10669 (QC. CA); Goldberg c. 9363-8542 Québec inc., 2024 QCCS 1837 (CanLII). (Ci-après l’arrêt Goldberg); Duval c. Habitats District Griffin Îlot 10 inc., 2018 QCSS 4703.

[6] Voir le paragraphe 79 de l’arrêt Goldberg.

[7] Article 228 de la Loi.

Pour toute question à ce sujet, consultez la page de l’équipe des services juridiques sur le site Internet de l’APCHQ, ou téléphonez au 438 315-6888 ou au 1 800 463-6142.

À propos de l'auteur

Me Martin Villa et Me Marc Bergeron

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