Droit de la construction Lois et règlements

Hypothèque légale de la construction : rappel des formalités

Plusieurs diront que tout a été écrit ou dit en matière d’hypothèque légale de la construction. Peut-être. Cependant, les tribunaux[1] rapportent régulièrement des cas indiquant que des personnes qui n’ont pas de lien contractuel avec le propriétaire d’un immeuble, notamment le sous-entrepreneur, ne peuvent bénéficier de cette hypothèque ou perdent leur droit de s’en prévaloir. Pourquoi? Une ou des formalités n’ont pas été respectées.

Dans le présent article, nous rappelons les principales formalités que le sous-entrepreneur doit respecter.

L’hypothèque légale de la construction

L’hypothèque légale de la construction vise à protéger les créances de ceux[2] qui ont participé à la construction ou à la rénovation d’un immeuble[3]. Les travaux de rénovation impliquent l’amélioration ou la remise en état d’un immeuble.

Dans le cas du sous-entrepreneur, l’hypothèque légale de la construction prend naissance à partir de la date de réception de la dénonciation écrite par le propriétaire de l’immeuble[4]. À la suite de la dénonciation, cette hypothèque garantit la plus-value apportée à l’immeuble et celle-ci est limitée aux travaux, matériaux ou services fournis.

Les objectifs de la dénonciation

La dénonciation permet au propriétaire d’être informé du fait qu’un entrepreneur général a donné un contrat à un sous-entrepreneur. Aussi, le propriétaire est avisé que ce sous-entrepreneur a l’intention d’exercer un recours hypothécaire (ex. : vente sous contrôle de justice) sur son immeuble, advenant le non-paiement de sa créance par l’entrepreneur général[5].

Le propriétaire peut ainsi se protéger en retenant, sur le prix[6] du contrat, une somme suffisante pour payer le sous-entrepreneur en cas de défaut de l’entrepreneur général.

Le contenu de la dénonciation a été déterminé par les tribunaux. Celle-ci doit contenir plusieurs informations :

  • Identification de l’immeuble visé par les travaux
  • Désignation du ou des propriétaires de l’immeuble
  • Identification de celui qui transmet la dénonciation écrite
  • Nom de l’entrepreneur avec lequel un contrat a été conclu
  • Prix du contrat
  • Nature des travaux, des matériaux ou des services
  • Mention selon laquelle la dénonciation est effectuée selon les articles du Code civil du Québec qui visent l’hypothèque légale de la construction

Les formalités entourant la dénonciation

Des formalités doivent être respectées, sinon, les tribunaux risquent de statuer que le sous-entrepreneur ne peut se prévaloir d’une hypothèque légale de la construction.

Essentiellement, celles-ci sont :

  • Détenir une licence appropriée délivrée par la Régie du bâtiment du Québec.
  • Identifier correctement le propriétaire de l’immeuble.
  • S’assurer que le contenu de la dénonciation soit complet et précis[7]. La connaissance par le propriétaire du contrat entre l’entrepreneur général et un sous-entrepreneur ne supplée pas à l’exigence d’une dénonciation écrite.
  • La dénonciation écrite doit être reçue par le propriétaire. Le critère est la réception et non la mise à la poste d’une lettre.
  • Cette dénonciation doit être reçue avant de commencer les travaux de construction.

Après avoir dénoncé les travaux et les avoir exécutés, le droit à l’hypothèque légale de la construction existe en faveur du sous-entrepreneur. Toutefois, pour conserver ce droit, celui-ci doit respecter certaines conditions.

Les formalités de conservation

Le sous-entrepreneur doit respecter les règles suivantes :

  • Avant l’expiration du délai de 30 jours suivant la fin des travaux, il doit inscrire un avis désignant l’immeuble grevé et indiquant le montant de la créance au registre foncier[8].
  • De plus, cet avis doit être signifié au propriétaire de l’immeuble[9].
  • À l’intérieur du délai de six mois de la fin des travaux, le sous-entrepreneur doit inscrire un préavis d’exercice d’un droit hypothécaire au registre foncier[10].

Cette notion de fin des travaux est importante. Essentiellement, elle signifie que l’ouvrage est terminé et qu’il est en état de servir à l’usage auquel il est destiné[11]. Le sous-entrepreneur doit être vigilant, considérant qu’il peut parfois être difficile de déterminer l’ensemble des travaux qui doivent être réalisés sur un chantier et leur échéancier. En effet, celui-ci est un tiers au contrat d’entreprise intervenu entre l’entrepreneur général et le propriétaire de l’immeuble. Aussi, le sous-entrepreneur est un tiers par rapport aux autres contrats de sous-traitance.

La diligence s’impose. Une mauvaise appréciation ou compréhension de cette notion peut entraîner la perte du droit à l’hypothèque légale de la construction. Par exemple, omettre d’inscrire l’avis au registre foncier dans le délai requis.

La conclusion

Certes, l’hypothèque légale de la construction confère des droits importants. Cependant, le défaut de respecter certaines règles peut entraîner la perte du droit de bénéficier de cette hypothèque. Le sous-entrepreneur a intérêt à être vigilant, surtout s’il a contribué d’une façon significative à une plus-value apportée à l’immeuble d’un propriétaire.

Si vous avez des questions en matière d’hypothèque légale de la construction, nous vous invitions à communiquer avec les Services juridiques de l’APCHQ aux numéros suivants : 438 315-6888 ou 1 800 468-8160.

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[1] Société en commandite Excelssoins Sainte-Geneviève c. 9380-3393 Québec Inc., 2023 QCCS 3201; 11489470 Canada inc. c. Constructions Maxime Langevin inc., 2023 QCCS 943. Jugement confirmé en appel: 2023 QCCA 922; Forage Dynaroc inc. c. Gingras-Croteau, 2023 QCCS 3659.

[2] Art. 2726 Code civil du Québec (ci-après C.c.Q). À titre d’information, ceux qui peuvent bénéficier de l’hypothèque légale de la construction sont: l’entrepreneur, le sous-entrepreneur, l’architecte, l’ingénieur, le fournisseur de matériaux et l’ouvrier.

[3] Art. 2724 (2) C.c.Q.

[4] Art. 2728 C.c.Q.

[5] Société de cogénération de Saint-Félicien, société en commandite/St-Felicien Cogeneration Limited Partnership c. Industries Falmec inc., 2005 QCCA 441, paragr. 61.

[6] Art. 2123 C.c.Q.

[7] Voir: Qu’est-ce que la dénonciation de contrat?

[8] Art. 2727 (1) C.c.Q.

[9] Art. 2727 (2) C.c.Q.

[10] Art. 2727 (3) C.c.Q.

[11] Art. 2110 C.c.Q; Société en commandite Excelssoins Sainte-Geneviève c. 9380-3393 Québec Inc., 2023 QCCS 3201, paragr. 67-68.


À propos de l'auteur

Me Martin Villa et Me Marc Bergeron

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