La Cour d’appel du Québec a rendu, le 4 octobre dernier, un arrêt important au regard de l’autoconstruction et du droit pour un entrepreneur général accrédité auprès de Garantie de construction résidentielle (GCR) d’œuvrer sur un chantier de construction d’une maison neuve à titre d’entrepreneur spécialisé.
Rappel des faits
En 2016, les propriétaires d’un terrain retiennent les services d’un entrepreneur pour effectuer divers travaux sur leur nouvelle résidence qui est un projet d’autoconstruction (juridiquement, un constructeur-propriétaire n’ayant pas l’obligation de détenir une licence pour les travaux visés). L’entrepreneur en cause est accrédité auprès de GCR et détient également toutes les sous-catégories de licence d’entrepreneur spécialisé pour effectuer les travaux faisant l’objet de son contrat.
En 2017, un litige survient entre les parties et une plainte est déposée à GCR. Cette dernière rend une décision par laquelle elle accepte une portion de la réclamation des bénéficiaires. L’entrepreneur porte cette décision en arbitrage.
Le 23 juillet 2018, un arbitre donne raison à l’entrepreneur et estime que le bâtiment n’avait pas à être enregistré auprès de GCR. L’arbitre considère que l’entrepreneur agissait à titre d’entrepreneur spécialisé sur le chantier en cause, n’étant pas responsable de la coordination et de la gestion du chantier, deux éléments qui distinguent l’entrepreneur spécialisé de l’entrepreneur général.
Dans les semaines suivantes, GCR dépose un pourvoi en contrôle judiciaire à l’encontre de cette décision. La Cour supérieure annule la décision rendue par l’arbitre. La Cour supérieure conclut que le seul fait pour un entrepreneur d’être accrédité auprès de GCR et de faire des travaux sur un immeuble résidentiel neuf obligeait ce dernier à enregistrer le bâtiment.
L’entrepreneur, par l’entremise du contentieux de l’APCHQ, a porté ce jugement en appel devant la Cour d’appel du Québec.
Décision de la Cour d’appel
La Cour d’appel du Québec a accueilli l’appel et rétabli la décision arbitrale. Les juges retiennent que l’interprétation de l’arbitre est défendable et préférable à celle de la Cour supérieure en raison du contexte de l’affaire. Les juges reconnaissent que l’entrepreneur général mentionné dans le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs ne peut être différent de celui défini dans le Règlement sur la qualification professionnelle des entrepreneurs et des constructeurs-propriétaires. L’arbitre pouvait donc à bon droit utiliser les définitions de ce règlement pour distinguer l’entrepreneur général de l’entrepreneur spécialisé. Or, les éléments qui distinguent les deux types d’entrepreneurs sont les notions d’organiser et de coordonner les travaux qui sont prévus dans la définition d’entrepreneur général.
La Cour d’appel souligne clairement que ce n’est pas parce qu’un entrepreneur accrédité à GCR fait des travaux sur un immeuble résidentiel neuf que celui-ci doit nécessairement enregistrer le bâtiment. Les juges précisent que le contexte factuel doit être examiné pour déterminer le statut de l’entrepreneur sur le chantier. Dans le dossier en cause, la preuve démontrait que les clients souhaitaient agir à titre d’autoconstructeur et conserver l’organisation et la gestion de leur chantier.
Ce jugement vient donc statuer qu’un entrepreneur détenteur d’une licence possédant diverses sous-catégories, dont certaines générales et d’autres spécialisées, peut avoir un statut différent sur des chantiers en fonction du contexte factuel en place.
Le jugement a également pour effet d’écarter la politique de GCR qui traite de l’obligation d’enregistrer le bâtiment par un entrepreneur accrédité lorsque celui-ci exécute deux travaux majeurs ou plus sur un chantier.
Dans l’éventualité où vous pensez agir à titre d’entrepreneur spécialisé pour un autoconstructeur et que vous souhaitez connaître vos obligations en la matière, nous vous invitons à communiquer avec les Services juridiques de l’APCHQ.
Nous vous précisons que GCR dispose d’un délai de 60 jours à compter du jugement pour déposer une demande d’autorisation d’appel à la Cour suprême du Canada si elle désire contester ledit jugement.