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L’impact des projets de loi 22 et 39 sur le secteur de la construction au Québec

Écrit par Félix Cadotte

Au Québec, l’adoption récente de deux nouveaux projets de loi, soit le projet de loi (PL) 22 concernant l’expropriation et le PL 39 ajoutant de nouvelles dispositions à la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme (LAU), engendre des modifications substantielles dans les pratiques d’expropriation et d’aménagement urbain.  

Ces changements, visant principalement à rationaliser les coûts et à accélérer les processus d’expropriation, risquent d’avoir des implications significatives pour les entrepreneur.e.s en construction. 

En septembre dernier, l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) déposait un mémoire dans le cadre du projet de loi 22 et soulevait, dans un communiqué, ses craintes d’y voir un frein aux investissements au Québec et une mise en péril des projets immobiliers en faveur des autres provinces canadiennes.

Réforme de la Loi sur l’expropriation 

Le PL 22, sanctionné en novembre 2023, présente une réforme complète de la Loi sur l’expropriation. Ce projet de loi introduit un processus d’expropriation accéléré et simplifié, dont l’un des buts est de réduire les coûts et les délais de réalisation associés aux projets publics. Pour les entrepreneur.e.s, cela peut signifier des délais de démarrage de projet plus courts, mais aussi une augmentation potentielle des cas où les propriétaires de terrains pourraient être expropriés sans les indemnités traditionnellement accordées. 

Modifications dans la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme 

Le PL 39, adopté et sanctionné en décembre 2023, modifie la LAU. Il permet maintenant à un corps public, comme une municipalité, d’imposer des restrictions sur l’utilisation des terrains sans indemniser les propriétaires, si ces restrictions sont jugées justifiables. Cette disposition peut limiter les possibilités de développement sur certains sites, affectant directement les entrepreneur.e.s qui dépendent de la clarté et de la prévisibilité des règles d’urbanisme pour planifier leurs projets. 

Impact de l’article 245 de la Loi 39 sur l’article 952 du Code civil du Québec 

Désormais, à la suite de l’adoption du PL 39, l’article 245 de la LAU représente un pivot législatif notable en permettant maintenant aux municipalités de porter atteinte au droit de propriété sur un immeuble sans offrir d’indemnisation, pour autant qu’il demeure possible de faire une utilisation raisonnable de l’immeuble. La modification de cet article vient introduire une exception à ce que stipule l’article 952 du Code civil du Québec.

L’article 952 garantit traditionnellement que toute expropriation doit être justifiée par une utilité publique et compensée par une indemnisation juste et préalable. En contraste, l’article 245 de la LAU introduit une nuance où certaines atteintes aux droits de propriété ne requièrent pas d’indemnisation si elles permettent toujours une utilisation raisonnable de la propriété, redéfinissant ainsi le paysage de l’expropriation et du droit de propriété au Québec. 

Selon l’article 245, une atteinte au droit de propriété est réputée justifiée lorsqu’elle résulte d’un acte qui vise soit : la protection des milieux humides et hydriques, la protection d’un milieu qui a une valeur écologique importante ou à assurer la santé ou la sécurité des personnes ou la sécurité des biens

L’APCHQ tient à rappeler son appui à la cible provinciale de zéro perte nette de milieux humides.

Impact économique sur les entrepreneur.e.s 

Ces modifications risquent de complexifier le terrain économique pour les entrepreneur.e.s. D’une part, l’accélération du processus d’expropriation peut faciliter la mise en œuvre rapide de projets d’infrastructures qui nécessitent des terrains, bénéficiant à ceux impliqués dans de tels projets. D’autre part, l’incertitude quant à l’utilisation future des terrains pourrait décourager les investissements dans le secteur de la construction, surtout pour les projets à long terme. 

Considérations légales et adaptations requises 

En introduisant des procédures standardisées et moins coûteuses pour les corps publics, le gouvernement espère accélérer les projets d’infrastructure tout en maîtrisant les dépenses publiques.

Cependant, pour les entrepreneur.e.s, ces changements imposent de nouveaux défis et nécessitent une adaptation rapide de leur part. Face à ces nouvelles règles, il est crucial pour les entrepreneur.e.s en construction de se tenir informé.e.s des modifications des règles d’urbanisme sur leur territoire et de leurs implications. Collaborer étroitement avec des expert.e.s en droit devient essentiel pour naviguer efficacement dans ce nouveau cadre réglementaire.  

L’APCHQ offre une gamme de services juridiques à ses membres. Pour en savoir plus.

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Félix Cadotte

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