Rénovation Technique

Détérioration des dalles sur sol : analyse et diagnostics

Saviez-vous que dans certains secteurs du Québec, l’achat d’une maison nécessite presque systématiquement un test de contenu en pyrite des remblais sous dalle ?

En fait, les essais effectués dans ce contexte sont plutôt informatifs et visent souvent à se dégager d’un éventuel recours en vice caché, à conforter votre prêteur hypothécaire ou bien à permettre une négociation plus agressive du prix de vente.

Les dalles de béton sur sol des bâtiments plus anciens sont sujets à bien des mécanismes de dégradation, et ce, sans nécessairement impliquer la présence de pyrite. Évidemment, si vous habitez sur la Rive-Sud de Montréal dans un bâtiment construit entre 1965 et 1995, il y a effectivement plus de probabilités que la pyrite soit présente dans les remblais sous dalle.

Ceci étant dit, pas de panique! Plusieurs phénomènes peuvent expliquer la dégradation et la fissuration des dalles de béton : sulfatation, réaction alcali-granulat, tassement du sol, retrait, qualité du béton, etc. Bref, une dalle de béton en place depuis plusieurs décennies risque fort probablement d’exhiber des signes de vieillissement sans qu’on doive absolument la remplacer.

En fait, les réactions chimiques qui viennent à bout de détruire le béton ont des origines différentes, mais elles ont souvent le même résultat, soit une prise de volume suffisamment importante à l’intérieur du matériau en causant la rupture.

Remblais expansifs

La prise de volume rencontrée lors de l’oxydation de la pyrite peut être importante et causer le soulèvement des dalles, ainsi que des poussées latérales à la base des murs de fondation. À noter que ces phénomènes seront accentués par le maintien de conditions humides dans le remblai. Le même genre de phénomène peut se produire lorsque des granulats réactifs sont mélangés au béton.

Sulfatation

Le contenu en souffre de la pyrite provoque aussi une dégradation chimique du béton : la sulfatation. Les sulfates sont en fait des sels dérivés de l’acide sulfurique, et ce dernier un produit de l’oxydation du soufre. La pyrite étant composée chimiquement de sulfure et de fer comme l’indique sa formule chimique « FeS2, disulfure de fer », on comprend alors mieux le rôle qu’elle peut jouer dans ces mécanismes. Mentionnons toutefois que la présence de sulfates n’est pas exclusivement liée à la pyrite.

On en retrouve aussi de façon naturelle dans les sols, les engrais, l’eau de mer et même dans l’air marin. Il est donc fréquent que le béton en contact direct avec le sol soit l’objet de sulfatation, surtout lorsque des conditions humides sont maintenues. Les études sur la pyrite ont d’ailleurs mis en lumière que la sulfatation du béton est efficacement bloquée par la simple présence d’un film de polyéthylène.

Pour que les mécanismes de sulfatation aient lieu, les sulfates doivent pénétrer le béton, et l’eau agira alors comme véhicule pour y introduire les sulfates. On peut donc en conclure qu’un sol comportant une quantité importante de sulfates et qui n’est pas en contact direct avec le béton, ou qui est maintenu bien au sec, ne poserait pas problème tant qu’il le reste.

Par contre, lorsque les sulfates pénètrent dans le béton, ils réagissent avec les constituants de la pâte de ciment pour entraîner la formation de nouveaux composants (gypse et ettringite). C’est ici que ça se corse puisque les produits de la sulfatation sont plus volumineux que le contenu original du béton. La pression interne créée par cette transformation entraînera donc la destruction de la matrice cimentaire, et ultimement une perte de cohésion du mélange de béton.

Alcali-réactions (RAG, RAS)

Les réactions alcali-granulat ou alcali-silice sont aussi fréquentes dans le béton, mais à l’instar de la sulfatation, les mécanismes qui se produisent proviennent des constituants du béton lui-même en condition d’humidité soutenue. Ainsi, les alcalis solubles du béton peuvent être amenés à réagir avec les granulats et la silice en présence d’eau.

Les phénomènes qui en résultent sont la prise d’expansion interne et la microfissuration du béton. Bref, la dégradation du béton.

Conservation de la dalle

Une question qui refait fréquemment surface après le démantèlement d’un faux plancher au sous-sol est la possibilité de conserver la dalle existante lorsque celle-ci présente de la fissuration ou certains dommages en surface. La simple vue de la dalle en relation, combinée à l’année de construction, devrait vous permettre de statuer sur sa conservation ou non dans la plupart des cas.

Les bombements de la surface du plancher, les affaissements importants, la fissuration aléatoire rapprochée, la différence de niveau entre les fissures et la perte de résistance sont des indices qu’il y a une dégradation avancée de la dalle. Il est judicieux de diriger le client vers un expert ou un laboratoire qui pourront statuer sur les mécanismes à l’œuvre et formuler des recommandations en conséquence.

Ceci étant dit, une dalle ayant plusieurs dizaines d’années de service exhibant des fissures et présentant de légères différences de niveau entre ses sections peut probablement encore servir de support de revêtement de sol, et ce, indépendamment de l’indice pétrographique du potentiel de gonflement (IPPG) de son remblai. Rappelons que le rôle de la dalle sur sol n’est ni plus ni moins que de servir de support de revêtement. Ainsi, la fissuration de la dalle au sous-sol demeure dans la plupart des cas esthétique et n’aura pas d’impact sur son utilisation.

À propos de l'auteur

Pierre-Marc Larochelle

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